Dehors, le monde souffle en rafales, et pourtant à l’intérieur, on peut allumer une lampe, fermer la fenêtre, se servir un thé. “La vie est dure mais pas la mienne.” Le mantra de Théo Detienne sonne comme une provocation et, pour beaucoup, comme un soulagement. C’est à la fois un clin d’œil au réel – rien n’est simple – et un choix intime – je refuse d’ajouter du chaos au chaos.

Ce n’est pas de la posture. C’est une technique. Un angle de vue qui aide à décider, travailler, apprendre, et traverser les saisons sans s’y dissoudre. On peut rejeter l’expression, la trouver arrogante. Ou on peut la prendre comme un outil : une mise à jour du logiciel interne pour vivre dans un monde rugueux sans s’y casser les dents.

Décrypter l’énoncé

Entendons-nous. Dire “la vie est dure” ne décrit pas son agenda Google. C’est un constat statistique : au-delà de nous, la complexité, l’imprévisible, la concurrence, les pannes, les biais, les frictions. “Mais pas la mienne” ne nie pas ce tableau. Il trace un cercle. À l’intérieur, j’organise, je dépile, je simplifie. Je ne contrôle pas le vent, mais je choisis la voile, la trajectoire, et le moment de lever l’ancre.

Ce double regard fait gagner du temps d’esprit. Au lieu de compter sur un monde qui s’apaise – fantasme – on s’intéresse à son rayon d’action. On développe un locus de contrôle interne : cette croyance que ce que l’on fait compte vraiment. Pas pour tout, pas tout le temps, mais assez pour changer le vécu.

Prenons un exemple. Deux personnes face à une journée chargée. La première dit : “C’est l’enfer.” Elle répond à tout dans l’urgence, subit les notifications, finit tard, vide. La seconde commence pareil, mais enclenche un rituel : 20 minutes de cadrage, deux priorités, un non assumé, une sieste de 15 minutes après déjeuner, une réunion convertie en document. La montagne est la même. Le chemin n’est pas le même. “La vie est dure mais pas la mienne” réside dans cette micro-architecture.

Ce n’est pas du déni, c’est de la couture. On ajuste la doublure pour que le manteau gratte moins.

Ce qui rend ce mindset opérant

Il ne suffit pas de se répéter une phrase. La clé se joue dans quelques mécanismes simples et robustes, qui transforment une posture en effets concrets.

Cartographier son rayon d’action

On ne pilote pas tout, mais on pilote toujours quelque chose : son énergie, son agenda, son seuil de tolérance, ses intentions, ses marges. Le mindset impose une question : où est mon levier? On se surprend alors à déplacer l’attention vers les éléments “ramenables” à soi. Une interface mal fichue? On crée un raccourci ou un modèle. Des décisions répétitives? On fixe des règles si/alors. Un imprévu récurrent? On met en place un buffer.

Ce travail de cartographie est un acte de réduction : on tranche du complexe au simple. Au bout de quelques semaines, le nombre de décisions stupides baisse. La friction descend. La sensation de maîtrise, elle, remonte. La vie là-bas reste dure. Ici, l’air devient respirable.

Passer de l’intention à l’infrastructure

Les intentions s’évaporent. Les infrastructures persistent. On confond souvent “discipline” et “système”. Le premier s’épuise, le second nous porte. Remplacer un vœu pieux (“je vais mieux gérer mes mails”) par un mécanisme (“deux créneaux de 25 minutes, filtres automatiques, dossiers par type de réponse”) change le vécu. Même logique pour l’apprentissage (sessions courtes, répétées, avec tests), la prospection (slots fixes, gabarits, suivi), la santé (heures d’extinction des écrans, sac de sport prêt, panier de fruits plutôt que biscuits).

L’infrastructure n’est pas glamour. Elle paye des intérêts composés. Elle construit une routine qui enlève les cailloux du quotidien. Elle met du velours sous les roues.

Augmenter ses marges de sécurité

La dureté du monde se ressent aux frontières. Là où tout est calé trop serré, chaque imprévu devient drame. Les marges – de temps, d’argent, d’énergie, de réputation – transforment un choc en incident. On pense coussin. S’endetter moins, prévoir une réserve, planifier avec 30% de gras, ménager des “jours pare-feu” sans réunions. La marge n’est pas une perte, c’est une assurance. Elle permet de rester calme quand le reste s’emballe.

Régler ses attentes avec la réalité factuelle

Ce mindset ne marche que si on accepte la météo telle qu’elle est. On s'appuie sur des statistiques, des taux de réussite pour s'éviter de fausses narrations héroïques. Dans le doute, on demande: “Pour des gens comme nous, dans ce contexte, que se passe-t-il d’habitude?” On anticipe les obstacles avec un pré-mortem : “Imagine qu’on a échoué dans six mois. Qu’est-ce qui a cassé?” Ça ne refroidit pas. Ça prépare. On voit venir les coins où ça frotte et on cale du feutre avant.

Réinterpréter sans se mentir

La dureté du monde est aussi un récit. On peut jouer avec la version. La psychologie de la réévaluation cognitive n’est pas un gadget. Interpréter un trac comme un signal d’activation et non de danger change la performance. Voir une critique comme un feedback constructif et non une attaque personnelle change la prise d’information. On ne fausse pas la réalité. On choisit la perspective la plus utile.

On comprend alors la logique profonde : “la vie est dure mais pas la mienne” signifie “je m’efforce de rendre mon coin du monde favorable à mes propres règles du jeu”. C’est un projet de design intérieur, pas une déclaration de supériorité.

Angles morts et garde-fous

Tout outil a ses risques. Celui-ci n’échappe pas à la règle.

D’abord, le privilège. Avoir de la marge, c’est déjà être chanceux. Deux personnes peuvent appliquer les mêmes principes et ne pas obtenir la même douceur de vie. Ce n’est pas une faute morale, c’est un contexte. Le mindset ne doit pas devenir un jugement sur ceux qui peinent. Mais il peut au contraire inciter à partager : une fois qu’on a du calme, on peut en offrir.

Ensuite, l’illusion de contrôle. À force de réussir à lisser son quotidien, on peut se croire invincible. Mauvais calcul. Garder le contact avec la réalité globale est essentiel. Continuer à lire des données, écouter des signaux faibles, se rappeler que la chance tient sa part. On peut avoir un très bon système et prendre un mur. La nuance est un garde-corps.

Enfin, l’empathie. Se simplifier la vie personnelle ne doit pas signifier se fermer au monde. On peut tenir ensemble exigence et compassion. Être ferme sur ses limites et généreux dans la compréhension. Savoir dire non sans devenir froid. La force de ce mindset est d’éviter de devenir une machine : une écologie personnelle est vivante, elle inclut les autres.

Les limites ne décrédibilisent pas la phrase. Elles la rendent durable. Un bon outil est celui qui s’emploie avec conscience.

On ne choisit pas la mer

Une métaphore pour finir : on ne choisit pas la mer, on équipe son bateau. On n’insulte pas la houle, on ajuste la toile. On ne nie pas la tempête, on cherche un mouillage sûr. Cette posture a un effet étrange : elle détend. Elle ne promet pas une vie sans difficultés. Elle promet une position de jeu plus avantageuse. Moins de friction, plus d’élan. Moins d’aléas subis, plus d’aléas apprivoisés.

La formule de Théo Detienne, prise au sérieux, ne vous vend pas un mirage. Elle vous met au travail là où vous pouvez gagner beaucoup avec peu : sur l’organisation intime du temps et de l’attention. Elle vous rappelle une évidence qu’on oublie vite dans le bruit : on peut être rigoureux avec soi et indulgent avec le monde. Penser “la vie est dure mais pas la mienne” n’est pas un slogan pour Instagram. C’est un protocole discret, quasi artisanal, qui construit une sensation : celle d’habiter sa vie plutôt que de la traverser en courant.

On peut la recevoir comme une injonction. On peut aussi la prendre comme un outil d’exploration. Essayez-la comme on essaie un nouveau clavier : quelques jours, puis on mesure. Est-ce que ça fluidifie? Est-ce que ça éclaire? Si oui, on garde. Si non, on ajuste. La vie restera dure pour longtemps. C’est précisément pour ça que ça vaut la peine de rendre la nôtre un peu plus praticable, un peu plus accueillante. Et si possible, contagieusement.

Pour aller plus loin

Pour prolonger cette idée d’habiter le chaos plutôt que de le nier, je vous invite à lire "Antifragile : Les bienfaits du désordre" de Nassim Nicholas Taleb. Il y explore comment tirer profit de l’incertitude, non pas en l’évitant, mais en construisant des systèmes qui se renforcent au contact des chocs.

La rédaction de Brained

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Cet article a été généré par l’IA, relu et retravaillé par un être humain.

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